Food Coop: réelle alternative?

Food Coop: réelle alternative?

Food Coop vous connaissez? C’est un documentaire qui relate l’histoire d’une grande surface organisée en coopérative  à Park Slope, arrondissement de New-York. Ce quartier de Brooklyn a une densité de population de 14.416 hab/km2. Cette coopérative a été fondée en 1973, dans un quartier que fuyaient alors les gens plus aisés. Depuis, il a connu une phase de gentrification dans les années 90.

Ce documentaire a été projeté à Nismes hier (le 20/4/2017). Il a été suivi d’un débat... ou plutôt d’une invitation à former un groupe de travail en vue de créer une coopérative de ce type dans la botte Hainaut-Namur.

L’impatience de voir des initiatives redynamiser notre région

Comme la plupart des personnes qui sont restées hier pour écouter  le témoignage de Margaux Joachim, co-fondatrice de Coop Eco à Charleroi, je suis très impatiente de trouver des solutions régionales pour mettre à la portée de tous une alimentation saine à prix raisonnable pour le consommateur ET pour le producteur…

Avec Frank, nous cherchons des alternatives qui pourraient encourager les jeunes à se lancer dans la production d’une alimentation saine. Nous avons notamment rencontrés les bénévoles d’Artisans Paysans. Les rencontres avec les producteurs de la région sont toujours une source d’émerveillement. Nous sommes aussi en alerte, curieux de tout ce qui se fait ailleurs. Pour ne citer que quelques exemples parmi des tas d’autres, à Lille, 24 agriculteurs créent une surface de vente commune en lieu et place d’un supermarché! Leur devise “L’union fait la ferme”. Albi et Rennes sont en marche vers l’auto-suffisance alimentaire.  Et il y a bien d’autres exemples d’initiatives à l’image d’une région.

Comme beaucoup l’ont été hier soir, je suis donc souvent agacée par toutes ces personnes qui opposent facilement des arguments intellectuels à tout projet d’initiative. C’est fatigant d’avoir face à soi des gens qui se demandent s’il ne serait pas possible de faire autrement ou encore mieux.  Je suis de ceux et celles qui se sentent parfois découragés par la difficulté de mettre en place des initiatives concrètes. La lourdeur des procédures démocratiques me fatigue souvent… Et pourtant, hier, je faisais partie de ceux qui interrogent et mettent en garde, de ceux qui proposent autre chose, de ceux qui ont l’art d’agacer.

Et si on partait des besoins de la “base”?

Hier soir, des questions sont restées sans réponse et semblaient même être malvenues. Elles étaient hors sujet.

Ne devrait-on pas d’abord voir d’autres alternatives avant de se lancer dans un projet de ce type? Est-ce pertinent de partir de ce modèle qui jusqu’à présent est mis en place dans les grandes villes? Quelles retombées pourrait avoir ce type de modèle sur notre région? Est-ce ce dont on a le plus besoin pour le moment? N’y a-t-il pas d’autres priorités sur lesquelles si nous pourrions travailler si nous voulons que les nombreux jeunes qui se sont installés ces derniers mois trouvent des débouchés? Food Coop ne serait-il pas un modèle fermé aux nouveaux venus comme semblent l’être nos marchés artisanaux locaux?

Ce n’était manifestement pas le lieu pour élargir le débat… et ce ne sera pas non plus le lieu dans le groupe de travail. Au moment de s’inscrire, il a en effet été bien spécifié que ce groupe travaillerait uniquement sur la mise en place d’une coopérative sur le modèle de Food Coop et de Coop Eco.

Un projet porteur pour notre région

Les supermarchés coopératifs s’installent dans des villes à forte densité de population, là où les producteurs d’alimentation n’ont pas de place pour se développer. Notre région est à l’opposé. Elle compte entre 50 et 60 habitants par km2. Elle regorge de terres agricoles et de parcelles tondues. Son potentiel est énorme si on se donne comme objectif de pouvoir nourrir un maximum de nos concitoyens avec une alimentation saine et locale.  Comment soutenir les projets? Encourager les jeunes, les aider à trouver des débouchés, notamment dans les collectivités? Comment les encourager à coopérer et à trouver petit à petit leurs complémentarités? Comment sortir de la culture de la concurrence, du monopole, de l’exclusivité?

Des jeunes producteurs à soutenir

Depuis quelques mois, des jeunes s’installent dans la région avec des projets très ambitieux. Ces jeunes qui ont beaucoup investi et se sont endetté n’ont pas accès aux marchés de terroir. Ces derniers ont pour règle de n’accepter qu’un ou deux vendeurs du même type, par exemple un ou deux maraîchers. Alors que les nouveaux manquent parfois de débouchés, les maraîchers officiels peuvent compléter leur offre avec des produits qu’ils achètent. Cette règle fait en sorte qu’on trouve sur les marchés qui se disent du terroir des produits qui ne sont pas du terroir… et des maraîchers locaux qui font de longs déplacement pour vendre leur produit ailleurs que dans la région.

Les producteurs d’une alimentation saine et locale doivent trouver des débouchés auprès d’un même profil de personnes. Et si on arrêtait de penser chacun à soi, à sa santé et à son portefeuille? Si on se concentrait sur le développement de la région? Ne serait-il pas urgent de prendre des mesures concrètes pour les soutenir et pour leur créer de nouveaux débouchés locaux?

S’il y a une coopérative, qui va la fournir? Tous le sproducteurs seront-ils égaux devant l’accès aux consommateurs? J’en doute. Cela risque bien d’être comme sur les marchés. Une autre question importante: où sera-t-elle située? Une formule comme “Paysans-Artisans” permet plusieurs lieux de dépôt. La seule restriction pour qu’un coopérateur puisse vendre ses produits, c’est la localisation (exception pour les produits comme les agrumes, le café, le cacao…)

Quels besoins privilégier?

A la question “Coop Eco privilégie-t-elle les produits régionaux?” la réponse a été nuancée… “Oui, mais…. Le prix est un facteur important aussi”. Pour avoir moins cher, les coopérateurs se fournissent plus loin s’il le faut. Le but premier de la coopérative me semble donc être de fournir une nourriture bonne et moins chère à ceux qui veulent prendre soin prioritairement de leur santé et accessoirement de la planète. Ensuite seulement un groupe de travail pourra-t-on peut-être s’interroger sur le développement de la région, la création de débouchés…

A la question de la mixité sociale, Margaux a avoué qu’elle n’existait pratiquement pas à Coop Eco. Si j’ai bien compris, Coop Eco n’est pas en mesure de rivaliser avec LDL et Aldi. Ce qui n’est pas étonnant vu la politique de ces derniers envers leurs fournisseurs et leurs producteurs et l’origine de leurs produits. Les gens moins aisés n’ont pas les moyens financiers – et sans doute aussi culturels – d’entrer dans ce type de coopérative.

Quelles retombées?

Supposons que le groupe de travail débouche sur un supermarché coopératif assez rapidement. Nous sommes en 2022. Imaginons… La coopérative a 3 ans. En y faisant ses courses, on y rencontre entre autre les mêmes que ceux que l’on rencontrait à Tournesol, chez Dany, chez Dominique, chez Laurence… La coopérative compte 300 coopérateurs qui donnent 2H30 de leur temps par mois pour s’offrir des produits à meilleur prix.   C’est l’équivalent de 5 temps plein. Que sont devenus les personnes qui travaillent à “Tournesol” à Chimay,  à “Les bienfaits d’O Dany” à Couvin et les autres alternatifs que vous connaissez?

Comment pensez-vous que les grandes surfaces ont réagi? Très réactifs, ils se sont donné les moyens de casser les prix! Ils vendent de plus en plus de bio et en vrac… Ils importent des produits “bio”. Les fonds de pension continuent à acheter des terres vierges à l’Est au détriment des paysans locaux… Bref, on alimente le système actuel.

Ce projet ne fait-il pas la même chose autrement que ceux contre lesquels nous voulons lutter?

Un autre avenir est possible

Imaginons que le milieu associatif se soit mobilisé pour une alimentation saine, locale et durable. Créatifs, les consommateurs se sont inspirés de plusieurs modèles pour répondre aux besoins collectifs et associatifs locaux.  Il s’agissait de rêver à un renouveau régional plus que de satisfaire les besoins individuels d’une poignée de personnes convaincues qu’elles devaient préserver leur santé.

Imaginons… Nous sommes en 2022. Le nombre de producteurs a explosé. Dans les collectivités, la nourriture est pratiquement complètement locale et le plus souvent bio. Les producteurs se sont côtoyés sur les marchés ouverts à tous.

A force de se rencontrer, les producteurs se sont spécialisés petit à petit et spontanément dans ce qu’ils faisaient le mieux et avec le plus de plaisir. L’offre régionale s’est diversifiée. De nombreux produits sont transformés dans des lieux collectifs. Certains se sont d’ailleurs spécialisés dans la transformation. Les marchés sont hebdomadaires, vivants. Ils rayonnent les couleurs et les accents locaux. Ils attirent de plus en plus de monde. Quelques camions se partagent les tournées dans le village. De nombreux emplois se sont créés. On rencontre un peu partout des petits entrepreneurs indépendants. Des familles vivent sur une petite exploitation ou dans un commerce de proximité. Chacun peut trouver rapidement près de chez lui des produits frais et de qualité….

C’est notre rêve… Quel est le vôtre?

Sortons de la culture libérale! Imaginons de vraies alternatives. Ensemble, rêvons notre région et donnons-nous les moyens de réaliser nos rêves!

Paysans Artisans: Aujourd’hui, c’est tout près de 2000 consommateurs, 15 emplois…. Capsule “Alors on change” et reportage complet à la 20ème minute Ici

 

A propos de l'auteur:

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Régente en mathématique, licenciée en psychopédagogie, sophrologue, auteur de « Victimes d’amour : Après tout ce que j’ai fait pour toi », paru chez Mardaga et de « Stop à l'ingratitude des enfants, conjoints, amis... et à la nôtre ". Pour acheter ce dernier, il suffit de verser 18€50 sur le compte de l'ASBL Réfl'Actions BE37 73205348 3528 avec en communication l'adresse complète de livraison. Vous pouvez aussi soutenir ce site en versant la somme de votre choix sur ce même compte.

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